Un pays où l’argent circule moins vite que les rumeurs, où la frontière ressemble davantage à un rempart qu’à une simple ligne sur une carte, et où accéder à Internet mondial relève du mirage : voilà le décor. Les transferts d’argent, surveillés à l’extrême, s’apparentent à un parcours d’obstacles quasi insurmontable. Impossible, ou presque, d’envoyer ou de recevoir des fonds depuis l’étranger. Pour la population, pas question d’aller surfer sur le Web : l’État verrouille tout, cantonnant chacun à un réseau interne sous contrôle permanent.
Quant aux frontières, elles ne s’ouvrent que pour de rares exceptions, sous l’œil aigu d’une surveillance militaire omniprésente. Même en jouxtant un voisin aussi proche que le sud, les deux pays vivent dos à dos : aucun flux commercial digne de ce nom, pas d’échanges culturels. L’armée, omniprésente, aligne l’un des effectifs les plus imposants au monde alors que, de l’autre côté, l’économie végète, coupée des échanges internationaux et frappée par l’embargo.
Corée du Nord : un État à part sur la scène internationale
Aux confins du nord-est asiatique, la Corée du Nord s’est affirmée, depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, comme le pays le plus replié sur lui-même. Sous la férule de Kim Jong-un, chaque aspect de la vie est orchestré par un pouvoir centralisé, qui veille à ne rien laisser échapper à son contrôle. Ce régime, solidement campé sur ses bases totalitaires, verrouille l’information et bride la circulation de ses citoyens d’une manière rarement observée ailleurs.
Près de 25 millions de nord-coréens évoluent dans un univers où la surveillance ne connaît pas de répit. L’État tient solidement les rênes : économie, médias, école, tout passe par le filtre du parti. Les droits de l’homme sont interprétés à la lumière des intérêts du régime. Le moindre signe de dissidence se paie au prix fort. Le chef est plus qu’un leader : il est l’objet d’une vénération savamment entretenue, omniprésent à chaque coin de rue, sur les murs, dans les esprits.
Voici quelques marqueurs concrets qui illustrent cette singularité :
- Liberté de presse absente : aucun média indépendant, tous les contenus passent par la censure.
- Isolement diplomatique marqué : quelques alliés triés sur le volet, presque aucun contact avec l’Occident.
- Économie marginale : la République populaire démocratique reste en dehors des grands échanges mondiaux, son PIB par habitant est l’un des plus bas d’Asie.
La densité de population, plutôt forte, ne masque pas la pauvreté des infrastructures ni le retard industriel, loin de la dynamique observée dans de nombreux pays émergents. Ici, la priorité reste l’autosuffisance, le repli, l’autocontrôle. La croissance stagne, la modernisation attendra.
Quelles différences majeures avec la Corée du Sud sur les plans culturel et économique ?
La péninsule coréenne expose aujourd’hui deux trajectoires diamétralement opposées. Au sud, la Corée du Sud s’est imposée comme une locomotive économique et technologique. Le nord, lui, campe sur un modèle de développement autarcique, à mille lieues de l’ouverture de son voisin. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : Séoul affiche un PIB par habitant qui surclasse celui du nord, reléguant ce dernier parmi les économies les moins dynamiques d’Asie.
Dans la vie quotidienne, la monnaie cristallise l’écart : le won nord-coréen ne circule pas à l’international, alors que le won sud-coréen s’échange sur les places financières du monde entier. Ce contraste monétaire reflète l’ouverture du sud et la fermeture du nord. Là où la Corée du Sud attire des millions de voyageurs et multiplie les partenariats, le tourisme de masse n’existe pas au nord. Les rares visiteurs sont strictement encadrés, chaque déplacement se fait sous l’œil des guides officiels.
Le fossé se creuse aussi dans la sphère culturelle. La culture sud-coréenne rayonne bien au-delà de ses frontières : K-pop, cinéma, arts visuels séduisent sur tous les continents. À l’inverse, la Corée du Nord mise sur la préservation d’une identité verrouillée, où la propagande occupe le devant de la scène et les traditions sont sacralisées. Côté démographie, l’écart saute aux yeux : la Corée du Sud affiche un des taux de mortalité infantile les plus bas, là où la situation reste critique au nord. Innovation, ouverture des idées, développement durable : toutes ces avancées caractérisent le sud, tandis que le nord impose à sa population un horizon sévèrement borné.
Frontières, armée et diplomatie : les ressorts d’un isolement persistant
La frontière de la Corée du Nord trace une ligne quasi infranchissable sur la carte. Avec seulement 1 352 kilomètres de frontières terrestres,principalement avec la Chine et, sur une courte portion, la Russie,le pays tourne presque entièrement le dos au reste du monde. Au sud, la zone démilitarisée (DMZ) s’étend sur près de 250 kilomètres : c’est l’une des frontières les plus surveillées au monde, hérissée de miradors et de barbelés, témoin direct de la guerre de Corée. Traverser cette ligne sans autorisation n’est pas une option : le risque est maximal.
Au quotidien, la présence militaire façonne la société. La Corée du Nord consacre une part immense de ses ressources à entretenir une armée massive : plus d’un million de soldats en activité. La doctrine officielle martèle l’autosuffisance, la vigilance, l’esprit de défense contre un ennemi omniprésent. La population évolue dans un climat de loyauté exigée, surveillée par les structures du parti et soumise à une discipline de fer.
Sur le plan diplomatique, la République populaire démocratique de Corée reste farouchement isolée. Les relations extérieures se limitent à quelques partenaires historiques, principalement la Chine et, dans une moindre mesure, la Russie. L’information reste verrouillée : aucune liberté de presse, censure généralisée, droits fondamentaux piétinés. Les contacts avec l’Europe ou les autres grandes puissances sont sporadiques, souvent conflictuels, sur fond de sanctions internationales. Cet isolement, bien loin d’être une simple posture, constitue le cœur de l’identité nord-coréenne : un État qui persiste à tenir le monde à distance, coûte que coûte.